L'histoire de la Gaspésie
Différents peuples ont empreint l’histoire de la Gaspésie. Des Micmacs aux pêcheurs basques et bretons, des Français, Acadiens, Loyalistes, Anglais et Jersiais… lui ont transmis un bel héritage culturel. L'histoire de ces pionniers vous est d’ailleurs racontée dans différents musées, centres d’interprétation et sites historiques, un peu partout en Gaspésie.
Les premiers Gaspésiens
L'histoire la Gaspésie a commencé avec les Micmacs, une des nations algonquine, surnommés les Indiens de la Mer qui occupèrent la péninsule depuis déjà plus de 2 500 ans lorsque les premiers colons européens débarquèrent au Canada.
Ces peuples vivaient d'une économie de subsistance basée sur la chasse et la pêche. La mer fournissait la plus grande part de leur nourriture. En été les groupes s'établissaient au bord de la mer, près des embouchures des rivières poissonneuses. En hiver, ils devaient s'enfoncer dans les terres pour chasser le caribou et autres mammifères présents dans la péninsule.
L'arrivée de Jacques Cartier
En 1534, deux navires français commandés par le Malouin Jacques Cartier entreprirent la traversée de l'Atlantique afin de reconnaître les terres nouvellement fréquentées de l'autre côté de l'océan et d'en prendre possession au nom du roi de France.
Après avoir longé Terre-Neuve en mai, puis vogué à proximité des côtes du golfe du Saint-Laurent, Jacques Cartier pénétra dans la baie des Chaleurs, accueilli par une température caniculaire.
Jacques Cartier prit pied à plusieurs reprises dans la baie afin de communiquer et de tisser des liens d'échange avec les Micmacs avant de débarquer ensuite dans la baie de Gaspé. Le 24 juillet 1534, il y fit ériger une croix portant l'emblème de la France pour marquer la prise de possession de ces terres au nom du roi. Cet acte hautement symbolique marqua le début de la présence française dans le Nord de l'Amérique et permit à l'aventurier d'arborer le titre officiel de découvreur de la Nouvelle-France.
Au temps de la pêche saisonnière
La colonisation du territoire ne s'enchaîna cependant pas immédiatement, la France étant, à cette époque, à la fois embourbée dans des conflits et dans des dissensions internes politico-religieuses.Les premiers pêcheurs normands, bretons, basques et rochelais commencèrent l'exploitation des bancs de morues de la côte gaspésienne.
Au début du XVIIe siècle, on y comptait cinq postes de pêche estivale importants. Matane constituait un des postes de traite des fourrures de la toute jeune colonie qui avait été établie plus à l'ouest par Champlain, sur les rives du Saint-Laurent. Le commerce des nations autochtones était désormais orienté vers la vente de fourrures aux Français.
Premiers essais de colonisation
Les premiers essais de colonisation permanente débutèrent au milieu du XVIIe siècle. On retrouve alors Nicolas Denys, Pierre Denys ainsi que Denis Riverin qui se firent octroyer les premières seigneuries. Les premiers postes de pêche et de traite permanents furent alors installés à Percé et à Mont-Louis où l'industrie de la pêche se développa de telle sorte qu'elle put fournir des produits de la mer aussi bien à la Nouvelle-France qu'au vieux continent.
Le développement des pêcheries françaises en Gaspésie fut entravé par de nombreux obstacles. En plus du sous-financement des entreprises et la difficulté d'attirer les colons dans un climat aussi rude, les incursions anglaises allaient en s'intensifiant.
Paix et guerre
Les guerres successives avec l'Angleterre se répercutaient en Amérique, et les Anglais commençaient à lancer des expéditions contre les postes français de la côte à partir de leurs riches colonies de la Nouvelle-Angleterre.
En Gaspésie, les expéditions de Kirke, en 1628, ainsi que la destruction de Percé, en 1689, furent dévastatrices. Comme conséquence du manque d'intérêt chronique de la France pour ses colonies d'Amérique du Nord et des difficultés qu'elle éprouvait alors en Europe du fait de la guerre de Sept Ans, les Anglais parvinrent à chasser définitivement leur grande rivale de l'Amérique du Nord. En 1758, à la suite de la chute de Louisbourg, ils purent ravager une fois de plus la côte gaspésienne avant que les troupes du général Wolfe ne s'emparent de Québec en 1759.
Coupée de la métropole, Montréal se trouva en détresse, si bien que, l'année suivante, une flottille de bâtiments apportant vivres et munitions appareilla de Bordeaux pour porter secours à la colonie. Malheureusement, le retard accumulé était trop important pour rattraper les vaisseaux anglais qui avaient devancé cette ultime tentative de sauvetage. Les Français se réfugièrent alors dans l'estuaire de la Ristigouche, au fond de la baie des Chaleurs où ils rencontrèrent de nombreux Acadiens eux-mêmes en fuite. Cela n'empêcha pas les Anglais de les débusquer et, après quelques jours de violents combats, de couler les principaux vaisseaux.
Le développement de la pêche à la morue
Après la conquête, l'industrie de la pêche put enfin se développer. De nouveaux établissements furent fondés, les anciennes seigneuries furent vendues à des marchands dans le but de servir comme bases pour la pêche. La morue constituait alors à cette époque l'essentiel des prises. On la prenait à la ligne dans de petites embarcations de juin à septembre, sans jamais s'éloigner des côtes. Des industries tributaires de la pêche virent progressivement le jour, et on vit apparaître en quelque temps toute une série de petits chantiers fabriquant des embarcations ainsi que des entrepôts de salage du poisson.
La pêche à la baleine, dans la baie de Gaspé, puis la pêche au saumon, pratiquée par les Micmacs dans les nombreuses rivières de la Baie-des-Chaleurs, vinrent contribuer à l'essor de cette industrie naissante qui commençait à se structurer.
La morue sèche, moteur de l’économie
En 1767, venu de Jersey, Charles Robin s'installa sur le banc de Paspébiac pour y exploiter la morue du golfe. Dans les années 1780, Robin réalisa un quasi-monopole. Les chargements de morue salée et séchée étaient acheminés vers Québec, les États-Unis et l'Europe.
À cette époque, la Gaspésie devait vivre presque exclusivement de ses propres ressources. En 1763, elle avait été rattachée politiquement à la province de Québec, en pratique, elle en restait pourtant coupée, on parvenait difficilement à remonter l'estuaire du fleuve Saint-Laurent. Par voie de terre, on était isolé par l'arrière-pays, où seules des routes de canot et des sentiers de portage étaient praticables. Mais, face à la menace américaine toujours présente, le gouvernement décida de relier militairement Québec à Halifax par la terre, en coupant à travers les terres vierges gaspésiennes. Terminé en 1832, le chemin Kempt relia la région de Métis à la Baie-des-Chaleurs, en passant par la vallée de la Matapédia. Ce chemin servit de prélude au développement de la région.
Des nouveaux arrivants
Vers la fin régime français, la Gaspésie ne comptait que quelques centaines d'habitants. Après la Conquête anglaise, la Baie-des-Chaleurs se peupla d'Acadiens chassés de leurs terres et réfugiés depuis à Restigouche.
Dans les années 1780, ceux-ci virent l'arrivée des Loyalistes, anglo-américains restés fidèles à la Couronne britannique à la suite de l'indépendance des treize colonies américaines. Aux Acadiens, aux Loyalistes et aux Micmacs déjà sur place, s'ajoutèrent des Québécois, venant pour la plupart de la ville de Québec et du Bas-Saint-Laurent, tout comme des immigrants écossais, irlandais ou anglo-normands.
Vers 1850, toutes ces communautés réunies totalisaient 20 000 habitants, et près de la moitié de leurs membres étaient d'expression anglaise. Tandis qu'elles se concentraient dans la Baie-des-Chaleurs, l'intérieur et le côté nord de la péninsule restaient quasiment inhabités.
Le virage du XXe siècle
Dès la fin du XIXe siècle, le visage de la Gaspésie changea considérablement. Elle brisa enfin son isolement avec l'extérieur, l'arrivée des bateaux à vapeur permettant des liaisons plus rapides avec Québec et les autres régions. On améliora par ailleurs les installations portuaires. La route fut également achevée entre Sainte-Anne-des-Monts et Gaspé, de telle sorte que toute la péninsule fut ceinturée et donc ouverte à la circulation. De plus, on relia par un chemin de fer, la côte à la pointe, en passant par la vallée de la Matapédia et la Baie-des-Chaleurs.
C'est aussi à cette période que l'industrie de la pêche à la morue se mit à décliner, les entreprises fondées par les Jersiais Robin, LeBoutillier, Fruing et autres durent faire face à la crise. Alors que les méthodes demeuraient artisanales, les goûts de la clientèle changeaient radicalement. On préférait alors le poisson frais ou congelé au poisson séché.L'industrie commença à se diversifier avec la pêche au homard et au hareng. Plusieurs gaspésiens se tournèrent alors vers l'agriculture, laquelle était restée jusqu'ici une activité marginale à cause d'un climat extrêmement rude et de l'éloignement trop accentué des principaux marchés d'échanges.
L’agriculture et l’exploitation forestière
En raison des pressions démographiques du Québec, où les familles étaient très nombreuses, on entreprit la colonisation de zones agricoles. Les terres cultivables restaient congrues, seule une frange littorale le long de la Baie-des-Chaleurs, la vallée de la Matapédia et les régions de Métis et de Matane étant économiquement exploitables. À ce moment, on cultivait surtout la terre pour subvenir à ses besoins.
Au tournant du siècle, on vit apparaître une nouvelle industrie : l'exploitation forestière. Jusqu'alors, la forêt avait fourni la matière première pour les petits chantiers navals locaux, on implanta alors une industrie de bois de sciage. Le bois coupé en hiver, dans l'arrière-pays, était transporté au printemps par le biais de la drave, sur les cours d'eau, vers les scieries localisées sur la côte. La compagnie Price, une des deux entreprises à l'origine de la multinationale Abitibi-Price, s'installa alors dans la région de Métis. Mais une grande partie du bois était transformée dans les scieries du Nouveau-Brunswick ou aux États-Unis.
La défense de la nation
La Gaspésie vivait en paix depuis plus de 200 ans lorsque la seconde guerre mondiale vint rompre sa tranquillité en charriant son lot de sous-marins allemands venus couler les navires marchands à destination de l'Angleterre dans le golfe du Saint-Laurent.
En 1941, le ministère de la Défense fit construire une base navale à Gaspé, HMCS Fort Ramsay. Cette place-fort abritait 3 000 hommes de l’armée, de la marine et de l’aviation canadienne. Sa mission était de patrouiller les eaux du golfe Saint-Laurent pour protéger les navires alliés contre les sous-marins allemands. Un puissant filet métallique sous-marin bloquait le passage donnant accès entre les deux presqu’îles de Sandy Beach et de Penouille. Des canons furent érigés à Fort Péninsule et à Prével.
Le commencement du tourisme
Depuis le début du peuplement européen jusqu'aux grands bouleversements sociaux des années soixante, la démographie fur galopante.
Malgré la diversication de l'économie locale, la création d'emploi ne suffisait pas à garder le surplus de main-d'oeuvre, et un fort courant d'émigration commança à se former dès la fin du XIXe siècle. Ne pouvant plus compter sur les flux d'immigration de la fin du XVIIIe siècle, la proportion d'anglophones dans la péninsule subit une lente décroissance.
Depuis le milieu du siècle, le tourisme a commencé à prendre une place de plus en plus importante dans la vie gaspésienne. Durant la période estivale, le tour de la Gaspésie est maintenant populaire chez les Québécois et les Européens. Les Américains commencent à découvrir depuis quelques années le charme et la beauté des paysages gaspésiens.
Aujourd'hui, l'économie de la région est centrée sur trois secteurs : la pêche, l'industrie forestière et le tourisme. Ces activités saisonnières et les activités de transformation qui leur sont associées représentent 30% de l'économie de la région. Les secteurs qui génèrent le plus grand nombre d'emplois sont les services de santé et services sociaux, commerce de détail, hébergement et restauration, enseignement, administration publique et fabrication ou transformation des aliments et boissons.
Référence : Histoire de la Gaspésie. Jules Bélanger, Marc Desjardins, Yves Frenette. 1981. Boréal Express.
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